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Les dĂ©boucheurs manuels ce sont des outils qui permettent de dĂ©boucher les bouchons et de vider les canalisations des Ă©lĂ©ments qui obstruent le passage de lâeau. Piston Ă ventouse il sâagit dâun caoutchouc en forme de ventouse fixĂ© Ă une poignĂ©e, gĂ©nĂ©ralement en plastique ou en bois, que lâon place au-dessus de la bonde de lâĂ©vier pour crĂ©er un vide qui tire la saletĂ© hors du tuyau. Il est efficace pour les bouchons mineurs et pour Ă©liminer pĂ©riodiquement les petits dĂ©bris qui tombent de la vaisselle, mais sâil sâagit dâun gros bouchon ou dâun bouchon situĂ© trĂšs bas dans le tuyau, il peut ne pas ĂȘtre trĂšs utile. Piston Ă manivelle câest lâoutil du plombier, et son utilisation requiert une certaine habiletĂ©. Il sâagit dâun long fil mĂ©tallique torsadĂ© que lâon fait passer dans lâĂ©gout lorsquâil faut dĂ©boucher un tuyau trĂšs bouchĂ©. Il est muni dâun crochet Ă lâextrĂ©mitĂ© qui attrape les gros dĂ©bris et les entraĂźne lorsquâon les ramasse. Pistons chimiques Les dĂ©boucheurs chimiques sont des produits que lâon verse dans la canalisation et qui brisent les bouchons en dissolvant les substances organiques les plus courantes dans les bouchons dâĂ©vier. Les dĂ©boucheurs chimiques industriels ont lâavantage dâĂȘtre trĂšs efficaces, mais ils ont le problĂšme que la plupart dâentre eux sont corrosifs pour les canalisations. Il y a trĂšs peu de bouchons que la soude caustique combinĂ©e Ă lâeau chaude ne peut pas Ă©liminer, mais câest un produit trĂšs agressif qui, sâil est utilisĂ© souvent, peut mĂȘme les percer. Les ventouses en gel ou en crĂšme sont plus douces, mais elles sont aussi beaucoup plus chĂšres. Lâune des plus grandes craintes, en ce qui concerne les pannes de notre installation de plomberie, est que nous soyons tranquillement chez nous et que soudain, lâeau se mette Ă jaillir dâun des points de lâinstallation. Lâeau ne cesse de sâĂ©couler, versant parfois des litres et des litres, ce qui peut inonder la piĂšce et affecter sĂ©rieusement notre maison ou mĂȘme celle des voisins. Dans cette situation, savoir ce quâil faut faire avant mĂȘme lâarrivĂ©e du plombier dâurgence peut nous Ă©viter bien des soucis. Câest pourquoi nous vous indiquons aujourdâhui ce quâil faut faire en cas de fuite dâeau sous pression. Fermez lâĂ©coulement de lâeau La premiĂšre chose Ă faire si vous vous trouvez dans cette situation est de vous calmer. Nous savons que câest difficile, mais les nerfs ne feront pas sortir moins dâeau, et encore moins rĂ©parer la fuite. Une fois que vous ĂȘtes dans le bon Ă©tat dâesprit et que vous voulez mettre fin au problĂšme, la chose la plus importante est dâessayer dâempĂȘcher lâeau de sortir. Il est prioritaire dâagir rapidement et efficacement, en couvrant avec un chiffon ou une serviette la partie par laquelle lâeau sâĂ©chappe. Ensuite, nous devons nous rendre Ă la source dâeau et la couper, de cette façon nous ne nous soucierons que de lâeau qui a dĂ©jĂ traversĂ© le tuyau. Nous placerons un seau ou un autre rĂ©cipient sous la fuite, pour recueillir lâeau qui se trouvait dĂ©jĂ dans notre installation. Une fois que lâĂ©coulement de lâeau sâest arrĂȘtĂ©, nous pouvons ramasser ce qui a Ă©tĂ© rĂ©pandu sur le sol et laisser la fuite aussi propre et nette que possible. RĂ©parer la fuite Pour ĂȘtre sĂ»r que la rĂ©paration sera un succĂšs, vous devez rester un moment sans ouvrir lâarrivĂ©e dâeau afin que les tuyaux et la partie touchĂ©e sĂšchent complĂštement, et Ă©videmment parce que lâeau recommencera Ă sortir de la fuite. Une fois sec, nous vous donnons plusieurs options que vous pouvez exĂ©cuter pour rĂ©parer la fuite correctement et que nous avons expliquĂ©es Ă plusieurs reprises dans notre blog sur la plomberie Fermeture de la fuite avec du calfeutrage Fixer la fuite avec des bandages ou des bandes de tĂ©flon. Changer un morceau de tuyau Si vous nâosez pas effectuer ces rĂ©parations, sachez que lâappel Ă un plombier permettra de rĂ©parer complĂštement la fuite. Pour lâinstant, vous avez dĂ©jĂ fait ce quâil fallait en coupant lâeau et en Ă©vitant dâautres dĂ©gĂąts dans votre maison. Et si vous dĂ©cidez de le rĂ©parer vous-mĂȘme, vous trouverez dans notre magasin en ligne dâaccessoires de plomberie ce dont vous avez besoin pour rĂ©ussir la rĂ©paration. 1 le tire fil et l'aspirateur ne donnant aucun rĂ©sultat, que puis-je faire pour dĂ©boucher ? a) air sous pression ? ça ne sera pas efficace pour une gaine au moins. En 1A quarante kilomĂštres, au nord-ouest de Grenoble dans le dĂ©partement de l'IsĂšre, se dessine une vallĂ©e Ă©troite sillonnĂ©e par un cours d'eau, la Fure. Les sept communes riveraines Charavines, Apprieu, Saint-Blaise de Buis, RĂ©aumont, Rives, Renage, Tullins-Fures, connaissent depuis le haut Moyen Age une diffusion d'activitĂ©s artisanales reposant sur l'usage de l'Ă©nergie hydraulique. 2Les antiques moulins Ă papier, battoirs Ă chanvre, gruoirs, forges Ă acier font place dĂšs le milieu du xixe siĂšcle Ă l'Ă©tablissement d'une grande industrie. Le textile liĂ© Ă la Fabrique lyonnaise, la papeterie, la mĂ©tallurgie, emploient Ă la veille de la Seconde Guerre mondiale, quatre mille personnes rĂ©parties dans les usines du Seuil de Rives, et de la vallĂ©e de la Fure. 3Si, aujourd'hui, les mĂ©tiers Ă tisser ont cessĂ© de battre, la papeterie, l'industrie mĂ©canique, la mĂ©tallurgie subsistent grĂące Ă une spĂ©cialisation des fabrications. A titre d'exemple, les Forges et AciĂ©ries de Bonpertuis, Ă Apprieu, produisent par an 6000 tonnes d'acier de coutellerie, tandis que la SociĂ©tĂ© anonyme des ateliers de construction Allimand, Ă Rives, construit du matĂ©riel de papeterie, machines Ă papier, de renommĂ©e internationale. 4Au cĆur de cette activitĂ©, la taillanderie illustre, Ă sa mesure, le cheminement que peut suivre une technique, une habitude » presque, fortement enracinĂ©e dans un lieu gĂ©ographique dĂ©terminĂ©. Des enquĂȘtes ethnographiques ont permis de mettre en Ă©vidence un milieu technique spĂ©cifique, rĂ©sultant de savoir-faire en place depuis plusieurs siĂšcles sur la vallĂ©e de la Fure, terrain privilĂ©giĂ© pour une approche ethnographique du fait industriel en milieu rural. 5 Le taillandier fabrique des outils propres Ă tailler par consĂ©quence, hache de charpentier, planes de charron, couperets, fers de rabots, ciseaux de menuisier et de sculpteur, rabots Ă pierre, calibres de moulure, serpes, cognĂ©es, doloire, faux, cisailles, pics, pioches, bĂȘches, boues, etc. » Pierre Larousse dĂ©finit ainsi ce mĂ©tier, dans son grand dictionnaire universel du xixe siĂšcle1, en insistant sur le caractĂšre Ă©clatĂ© et diversifiĂ© de cette profession. On ne voit pas, dit-il, que se soient formĂ©es dans le Moyen Age des corporations de taillandiers comme il s'en Ă©tait formĂ© dans d'autres industries. 6La forme et l'organisation de l'industrie sidĂ©rurgique en France, jusqu'Ă la fin du xviiie siĂšcle contribuent, pour partie, Ă l'explication de ce fait. 7A la veille de la RĂ©volution, le martinet de forge est complĂ©mentaire des Ă©tablissements producteurs de fer. Il offre un dĂ©bouchĂ© naturel aux fers de seconde qualitĂ© produits dans les forges de l'AriĂšge, du PĂ©rigord, de la NiĂšvre, de la Haute-Marne, La taillanderie se rĂ©sume alors Ă une fabrication d'outillage agricole grossier, conçu Ă partir d'une matiĂšre premiĂšre de qualitĂ© mĂ©diocre. Ainsi importe-t-on d'Allemagne ou d'Angleterre, une grande quantitĂ© d'acier fin transformĂ© dans les quelques fabriques spĂ©cialisĂ©es du Forez, et de Saint-Etienne. Les faux et autres produits finis, dĂ©licats Ă façonner, sont importĂ©s de Styrie, de Carinthie3. 8Les grandes innovations techniques en matiĂšre sidĂ©rurgique, au xixe siĂšcle, permettront un accroissement de la production d'acier fondu et corroyĂ© en billettes, ou en barre. La taillanderie profite alors largement de ces dĂ©couvertes. Ainsi, des ateliers dĂ©velopperont des productions spĂ©cifiques, et acquĂ©reront une renommĂ©e nationale et internationale. C'est le cas des taillanderies en Franche-ComtĂ©4, rĂ©putĂ©es pour la fabrication des faux, et de bien d'autres ateliers dans la Loire, en Alsace, dans le Tarn, etc. Artisanat, industrie et facteurs de dĂ©veloppement en DauphinĂ© 9Le dĂ©partement de l'IsĂšre est la seule province productrice d'acier, en France, jusqu'au dĂ©but du xixe siĂšcle. En 1811, un recensement fait Ă©tat de 27 forges Ă acier, rĂ©parties sur le Seuil de Rives et dans le Bas-DauphinĂ©. Celles-ci produisant annuellement 1800 tonnes d'acier, et 945 tonnes de fer5. L'acier fin est entiĂšrement exportĂ© vers les fabriques d'armes de Saint-Etienne, ou la coutellerie de Thiers, tandis que l'acier fendu ou ferreux est transformĂ© sur place en outils pour l'agriculture. 10Les taillanderies sont alors de petits ateliers comprenant une soufflerie, un marteau, une meule, une batteuse, actionnĂ©s par des roues Ă aubes. Un maĂźtre et un apprenti fabriquent ou raccommodent toute sorte d'outils pour le marchĂ© local6. Cette forme artisanale de production perdurera jusqu'Ă la Seconde Guerre mondiale dans des vallĂ©es montagneuses reculĂ©es. Robert Boulin en fait largement Ă©tat sur des relevĂ©s ethnographiques effectuĂ©s entre 1952 et 1955, dans les Alpes-Maritimes, en VĂ©subie, TinĂ©e, 11Les taillandiers de la Fure orientent rĂ©solument leur activitĂ© vers un stade industriel dĂšs la seconde moitiĂ© du xixe siĂšcle. La production d'acier s'Ă©tant dĂ©placĂ©e vers les centres miniers, la vallĂ©e de la Fure concentre alors une main-d'Ćuvre disponible, spĂ©cialisĂ©e de longue date dans le travail du fer. L'Ă©lan est donnĂ© par Mathieu Revollier, d'origine stĂ©phanoise qui installe en 1865, Ă Renage sur l'emplacement de deux anciennes forges Ă acier, une fabrique de faux et faucilles. Profitant de l'ouverture du rĂ©seau de communication avec la crĂ©ation d'une ligne de chemin de fer, Saint-Rambert-Rives, et Lyon-Grenoble, il dĂ©veloppe rĂ©solument sa production vers l'outillage professionnel pour les mineurs, maçons, menuisiers, etc. 12Les artisans de la vallĂ©e s'ouvrent alors Ă l'esprit d'entreprise, et suivent l'exemple du StĂ©phanois. Le marchĂ© local, rĂ©gional, national, et international est en pleine expansion. En l'absence de mĂ©canisation, l'agriculture, mais aussi les grands amĂ©nagements routiers, hydroĂ©lectriques, urbains, industriels, nĂ©cessitent une production importante d'outils de toute nature, de tout genre, pelles, pioches, faux, truelles... Cette pĂ©riode faste se prolongera jusqu'Ă la Seconde Guerre mondiale. 13BĂ©nĂ©ficiant de l'essor de la province liĂ© Ă l'exploitation de la houille blanche, les usiniers de la Fure crĂ©ent en 18998 une sociĂ©tĂ© d'exploitation de petites centrales hydroĂ©lectriques, la sociĂ©tĂ© Fure et Morge. Le courant fourni sur le rĂ©seau Ă©lectrique est alors complĂ©mentaire de l'Ă©nergie produite par les turbines, Ă©quipĂ©es au pied des chutes amĂ©nagĂ©es sur la Fure. 14A la veille de la PremiĂšre Guerre mondiale, les taillandiers de la Fure rĂ©unissent toutes les conditions nĂ©cessaires au plein essor de leur activitĂ© une main-d'Ćuvre disponible et formĂ©e, un rĂ©seau de communications ouvert, un potentiel Ă©nergĂ©tique important. L'usine Bret Ă Charavines emploie de 70 Ă 80 ouvriers. Le site compte trois chutes, la premiĂšre fait mouvoir cinq roues, deux turbines pour actionner les martinets, une sixiĂšme roue fait tourner deux meules et actionne la tournerie. La seconde chute actionne quatre turbines pour deux martinets et diverses machines-outils, tandis que la troisiĂšme comporte une turbine attelĂ©e avec un moteur Ă©lectrique pour un compresseur d'air Ă l'usage des marteaux. Trois marteaux sont actionnĂ©s par des moteurs Ă©lectriques d'une force de 30 CV. L'usine Gourju du Rivier d'Apprieu, spĂ©cialisĂ©e dans la fabrique de versoirs pour les charrues, compte 16 ouvriers, l'usine Experton-Revollier Ă Renage 80 ouvriers, huit turbines, 12 roues hydrauliques, et un complĂ©ment de force pris sur le secteur pour une puissance forfaitaire fixe de 120 CV. L'usine Rival de Fure comporte une installation plus modeste, avec quelques roues de pĂȘche »9. 15Selon une convention tacitement admise dans le groupe professionnel, le terme taillanderie » dĂ©signe trĂšs gĂ©nĂ©ralement les fabrications d'outils forgĂ©s. Ainsi aux outils Ă tailler, s'ajoutent la martellerie, la fabrication de faux et de faucilles, l'outillage professionnel divers, les bĂȘches, louchets, et les articles tranchants de mĂ©nage et de boucherie. Les catalogues professionnels font Ă©tat des spĂ©cialitĂ©s de chacun. L'album de F. Bret, fabrique d'articles de taillanderie Ă Charavines, propose, en 1883, des outils rĂ©servĂ©s Ă l'agriculture. Le catalogue de P. Experton-Revollier Ă Renage, expose de l'outillage pour les tailleurs de pierre, les mineurs, les maçons... Les Forges et Taillanderies du Grand-HurtiĂšre, Ă Fure, rĂ©servent, quant Ă elles, une part importante aux couperets de cuisine, hachoirs Ă main, couteaux Ă pain. 16Le forgeage Ă main », par opposition aux procĂ©dĂ©s mĂ©canisĂ©s comme le forgeage Ă la presse, l'estampage, ou le matriçage, repose sur l'utilisation d'un martinet, marteau Ă©lectrique connu sous le vocable de marteau Bradley. Du martinet hydraulique, utilisĂ© vraisemblablement depuis le xiie siĂšcle10, au martinet Ă©lectrique, qui techniquement lui succĂšde aprĂšs la PremiĂšre Guerre mondiale, le façonnage d'un outil s'opĂšre selon une chronologie prĂ©cise, de gestes et d'opĂ©rations techniques. Presque toutes les manipulations platinage, traçage, Ă©barbage, trempe, revenu, redressage, aiguisage, polissage, sont strictement masculines. Apprentissage et transmission du savoir 17Au centre de la chaĂźne opĂ©ratoire11 se trouve le platineur. Son travail conditionne le rythme et la qualitĂ© des productions de l'atelier. D'un plat d'acier, il façonne n'importe quelle forme d'outils. Son art ne s'enseigne pas Ă l'Ă©cole, aussi un ouvrier dĂ©sireux d'apprendre le mĂ©tier, se place comme apprenti Ă l'usine, dĂšs la sortie de l'Ă©cole, Ă seize ans. Il occupe d'abord un emploi peu qualifiĂ©, chauffeur, chargĂ© d'enfourner les piĂšces, puis il est ensuite affectĂ© Ă des travaux de finition, tels le planage ou le redressage. Il aura soin d'observer attentivement les diffĂ©rents gestes du forgeron. M. Charton, aujourd'hui platineur, est rentrĂ© Ă l'usine Ă seize ans. Tout d'abord chauffeur, le platineur lui a montrĂ© quelques "trucs" pour Ă©baucher, Ă©tirer une lame. A son retour de l'armĂ©e, il travaille "sur le marteau", ses premiers outils forgĂ©s ont Ă©tĂ© des haches. Quelques annĂ©es plus tard, il rĂ©alise des bĂ©chards, aujourd'hui, il est le seul Ă savoir forger des tenailles, outil entre tous dĂ©licat Ă rĂ©aliser. C'est l'amour de son travail, dit-il, qui lui a permis d'acquĂ©rir une telle qualification. Il en retire quelque fiertĂ©, et assure ne pas vouloir changer de mĂ©tier malgrĂ© la pĂ©nibilitĂ© de celui-ci. » 18Les tĂ©moignages rapportent qu'autrefois l'apprentissage Ă©tait difficile, les discriminations frĂ©quentes entre les vieux ouvriers peu soucieux de transmettre leur savoir, et les jeunes avides d'apprendre. Bruno Feydel, platineur, rapporte qu'au dĂ©but de son apprentissage les vieux forgerons "montraient le contraire", ou bien refusaient que l'on se serve de leur marteau. Certaines fois le patron devait intervenir et obliger les platineurs Ă enseigner le mĂ©tier aux jeunes. » Cette rĂ©tention du savoir illustre la conscience qu'avaient les platineurs d'appartenir Ă une Ă©lite, trĂšs soucieuse de protĂ©ger ses privilĂšges. Seuls ceux qui avaient surmontĂ© les Ă©preuves par leur tĂ©nacitĂ© et leur intelligence pouvaient ĂȘtre admis parmi les meilleurs. Pour tous, l'entrĂ©e Ă l'usine Ă©tait marquĂ©e par des farces plus ou moins agrĂ©ables. L'apprenti se baladait toute une journĂ©e, lourdement chargĂ©, d'un poste Ă l'autre de l'atelier Ă la recherche de la forge neuve. » Des Ćufs gobĂ©s par les anciens, Ă©taient remplis d'eau, ou d'un autre liquide, puis Ă©crasĂ©s sur la tĂȘte des apprentis. » Ou bien encore, les jeunes Ă©taient tenus de boire plusieurs litres de vin en continu. TĂ©moignages recueillis aux Forges et Taillanderies de Charavines. 19C'est pourtant Ă l'obstination12 de l'apprenti Ă apprendre, Ă s'exercer en dehors des heures de travail, que le contremaĂźtre devine un futur platineur. En effet, ne devient pas platineur qui veut. Les aptitudes requises sont nombreuses intelligence, Ćil exercĂ©, confiance en soi, coordination des mouvements, et surtout une volontĂ© farouche. 20Plusieurs annĂ©es sont nĂ©cessaires Ă la maturation d'un bon platineur. En trois ans, il est capable de forger une ou deux sortes d'outils, en cinq ans son champ s'Ă©largit, mais il faut attendre quelque dix annĂ©es de pratique pour qu'il sache rĂ©pondre Ă n'importe quelle demande du contremaĂźtre. Toutefois, chacun possĂšde une spĂ©cialisation. Marius Tamini, cinquante ans, platineur aux prĂ©fĂšre forger de gros outils, tels les haches, les bĂ©chards, les binettes... Le travail est certes plus pĂ©nible, mais prĂ©sente des difficultĂ©s moindres par rapport au façonnage d'instruments plus fins, comme les serpes, les faucilles. Il forge environ 300 binettes par jour, 150 bĂ©chards Ă deux dents, 100 Ă trois dents. 21Au sein de l'atelier, une nette admiration transparaĂźt dans les propos des ouvriers pour le travail du platineur. Beaucoup auraient souhaitĂ© l'ĂȘtre, mais avouent la difficultĂ© d'apprentissage. Sans amertume, M. Blanc-Mathieu, redresseur, dĂ©crit l'habiletĂ© et la finesse du travail de forgeage. Pourtant les difficultĂ©s qu'il a rencontrĂ©es Ă l'apprentissage de celui-ci, l'ont poussĂ© Ă choisir un poste diffĂ©rent. Certains attribuent leur Ă©chec au peu de temps dont dispose le platineur pour former l'apprenti. Celui-ci perçoit en effet, outre un salaire fixe, une prime de rendement calculĂ©e sur le supplĂ©ment d'outils forgĂ©s au quota fixĂ©. 22Pendant la pĂ©riode de croissance des taillanderies, 1890-1914, le recrutement des ouvriers s'effectue selon deux schĂ©mas. Un recrutement local, sur les communes alentour, un recrutement extra-rĂ©gional. Ce dernier a pour but essentiel d'accueillir au sein de l'usine, des ouvriers hautement qualifiĂ©s, dĂ©tenteurs de secrets de fabrication appris dans les ateliers concurrents. Il semble que cette main-d'Ćuvre mobile ait beaucoup contribuĂ© Ă l'Ă©volution des types de fabrication, et Ă la mise en Ćuvre de procĂ©dĂ©s nouveaux. 23L'origine de ces maĂźtres-ouvriers, autrement appelĂ©s compagnons, est diverse. Le plus souvent, ils viennent du dĂ©partement, ou des rĂ©gions proches, Savoie, Haute-Savoie, Loire... A l'exemple de M. Alsina, forgeron de La Chapelle-du-Bard, Savoie, ils se dĂ©placent parfois avec leur famille, et sont logĂ©s Ă l'usine dans des appartements qui leur sont rĂ©servĂ©s. Ils travaillent Ă façon, Ă l'image des artisans, se chargeant de l'exĂ©cution de la commande pour toutes les opĂ©rations de forgeage. Le compagnon est alors son propre patron » dans l'atelier, c'est lui qui rĂ©tribue le chauffeur sur le salaire qu'il perçoit pour la rĂ©alisation des sĂ©ries. EmbauchĂ©s Ă l'usine pour une pĂ©riode plus ou moins longue, selon l'offre et la demande, ces ouvriers acquiĂšrent une expĂ©rience et une qualification professionnelles qui les placent en deçà du monde ouvrier dans lequel ils se fondent peu. 24ParallĂšlement, l'essentiel de la main-d'Ćuvre de l'usine est recrutĂ©e sur place. Le patron embauche en prioritĂ© les enfants des ouvriers. A cela, plusieurs raisons. Il s'assure ainsi d'une certaine cohĂ©rence dans son personnel, d'une stabilitĂ© professionnelle intĂ©ressante dans un atelier oĂč peuvent se succĂ©der deux ou trois gĂ©nĂ©rations d'ouvriers d'une mĂȘme famille. Aujourd'hui encore, aux Forges et Taillanderies de Charavines, deux platineurs sont issus d'une lignĂ©e de forgerons maison ». Mais ces ouvriers recommandĂ©s » sont aussi pour le patron une assurance que la transmission du savoir, l'apprentissage, s'opĂ©rera dans de bonnes conditions. La stabilitĂ© de la main-d'Ćuvre est moins nette aujourd'hui que pendant la premiĂšre moitiĂ© du xxe siĂšcle. Pourtant l'environnement rural des taillanderies contribue largement Ă maintenir un personnel fixe, trĂšs souvent pluriactif, dont la mentalitĂ© est, selon l'expression mĂȘme du directeur d'une usine, particuliĂšrement bonne ». La sociabilitĂ© ouvriĂšre 25 Les rapports entre les ouvriers sont bons, c'est seulement dans les forges qu'on trouve une ambiance pareille. Ailleurs, mĂȘme dans les petites boĂźtes, c'est diffĂ©rent. » Interview, op. cit.. L'ambiance de l'atelier est faite de moments partagĂ©s, avec toutefois un caractĂšre largement positif. La convivialitĂ© pendant les heures de travail s'exprime dans les temps de pause ; les ouvriers bavardent entre eux, et boivent un verre ensemble. Moins rĂ©pandue qu'autrefois, l'habitude de consommer du vin existe aujourd'hui encore. Sans excĂšs, elle est un moyen de trouver une dĂ©tente aprĂšs des heures de travail oĂč le corps est durement soumis aux bruits des marteaux, Ă la chaleur du four. Jusqu'en 1950, aux Forges et Taillanderies de Charavines, la majoritĂ© des ouvriers habitait dans des logements construits par le patron. Le fait de vivre ensemble maintenait fortement les liens nouĂ©s pendant les heures de travail. Cette vie sociale Ă©tait rythmĂ©e par les saisons. En hiver, aprĂšs le travail, les ouvriers allaient passer la soirĂ©e les uns chez les autres, jouer Ă la belote, on Ă©tait ensemble, il y avait de l'ambiance tous les soirs », dit Bruno F. L'Ă©tĂ©, les activitĂ©s en commun Ă©taient plus nombreuses jardinage et jeu de boules. Chaque famille avait droit Ă un jardin situĂ© en bordure de la Fure, en amont de l'usine. Tous ensemble, ils bĂȘchaient, semaient, plantaient... quand on Ă©tait rĂ©uni le soir, on riait de bons coups ». Si le jardinage se faisait quotidiennement, le jeu de boules, la lyonnaise, se pratiquait surtout le samedi et le dimanche dans la cour de l'usine. C'Ă©tait aussi une occasion de bien boire. Le vin Ă©tait achetĂ© Ă la coopĂ©rative La Fourmi situĂ©e en face de l'usine On mettait le cageot Ă rafraĂźchir dans le bassin, et le lundi, on comptait les capsules cinquante-neuf, ça avait Ă©tĂ© une bonne journĂ©e. » L'amĂ©lioration des conditions de vie a permis Ă la plupart des ouvriers de construire une maison et d'habiter des sites plus riants. Aussi, cette vie trĂšs communautaire, a eu tendance Ă Ă©clater. Toutefois, certaines activitĂ©s communes ont persistĂ© et d'autres liens sociaux, plus Ă©largis, sont apparus. 26Saint-Eloi, patron des forgerons, est annuellement fĂȘtĂ© par un banquet qui se dĂ©roule le premier samedi du mois de dĂ©cembre. Si l'esprit de cette rĂ©union est strictement masculin, une entorse est faite Ă la rĂšgle, puisque aujourd'hui une femme, ouvriĂšre de l'usine, est admise. Le repas, pris dans un restaurant d'une commune alentour, est l'occasion pour chacun de raconter les innombrables rĂ©cits et anecdotes qui jalonnent la vie des ateliers. PrĂ©sente dans toutes les mĂ©moires, la chanson des forgerons est entonnĂ©e en chĆur, rythmĂ©e par des chocs de bouteilles, reproduisant le bruit du marteau sur l'enclume. 27Chaque veille de fĂȘte, de dĂ©part en vacances, est le prĂ©texte d'une petite rĂ©union oĂč l'on grille sur le feu de l'orge, quelques saucisses, oĂč l'on dĂ©guste la tomme maison », avec un petit vin de pays. L'on se sĂ©pare sur une partie de boules dans la cour de l'usine. Il est surprenant de noter la force et l'importance que revĂȘtent pour chacun ces traditions professionnelles. Alors que de nombreux ouvriers prennent part Ă d'autres formes d'activitĂ©s sociales, association de boules, de pĂȘche, de chasse, chacun exprime son attachement aux vieilles fĂȘtes ouvriĂšres en y participant activement. Technique et chaĂźne opĂ©ratoire 28La mise au mille calcul de rendement effectuĂ©e par le contremaĂźtre permet de dĂ©terminer le poids d'acier nĂ©cessaire Ă la fabrication d'un outil. Le calcul est fait par addition du poids de dĂ©chet, la calamine oxyde de fer qui recouvre le mĂ©tal chaud, produit par une main moyenne au poids de l'outil fini. Un croissant de 900 g est forgĂ© Ă partir d'un lopin de 1400 g. Sur l'ensemble formĂ© par le marteau Ă©lectrique, de type Bradley, le platineur procĂšde avant chaque sĂ©quence Ă l'aiguisage et au montage de la paire d'enclumes. Deux grandes sĂ©ries d'enclumes sont Ă distinguer. Les enclumes pour Ă©baucher et Ă©carter, et les enclumes de finition pour le planage. A cela se rajoutent les diffĂ©rences de formes qui varient avec les diffĂ©rences d'outils. 29L'enclume de frappe s'insĂšre dans la bocquette ou tĂȘte du marteau, l'enclume du bas, le tas Ă forger se fixe sur la chabotte, partie immobile du marteau. Avant d'ĂȘtre montĂ©e, la paire d'enclumes est soigneusement aiguisĂ©e Ă la meule. Le platineur porte une attention particuliĂšre Ă cette opĂ©ration qui dĂ©termine la battue correcte, c'est-Ă -dire la portĂ©e des enclumes l'une sur l'autre. Le montage et le calage s'effectuent Ă l'aide de clefs enfoncĂ©es en force Ă la masse. Le platineur rĂšgle enfin la hauteur de frappe du marteau Ă l'aide d'un morceau de mĂ©tal, de l'Ă©paisseur de l'Ă©bauche, posĂ© verticalement sur le tas Ă forger. AprĂšs vĂ©rification de la longueur de la battue, le platineur peut alors s'asseoir sur sa balancelle et amorcer l'Ă©bauche de l'outil. Le platinage 30Le platinage recouvre deux opĂ©rations distinctes, l'Ă©bauchage-Ă©cartage, et le planage-biseautage. Elles sont assurĂ©es par le platineur autrement appelĂ© forgeron. Des variations existent dans les diffĂ©rentes opĂ©rations de forgeage d'un outil. D'une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, les Ă©tapes techniques sont les mĂȘmes, alors que le matĂ©riel utilisĂ©, enclumes, tenailles, diffĂšrent. La position du platineur varie elle aussi ; il peut ĂȘtre assis ou bien debout face Ă son marteau. Des relevĂ©s ethnographiques ont Ă©tĂ© effectuĂ©s pour trois grandes sĂ©ries ; l'outil Ă soie comme la faucille, l'outil Ă douille roulĂ© comme le croissant, l'outil Ă douille central comme le croc. La sĂ©quence suivante illustre la fabrication d'un croissant, modĂšle croissant de Paris, utilisĂ© couramment pour Ă©laguer les branches hautes des arbres. L'Ă©bauchage, premiĂšre chaude chauffe, en terme professionnel... 31Le platineur, assis sur la balancelle, saisit Ă l'aide d'une longue paire de tenailles le lopin d'acier, chauffĂ© Ă 1200 °C dans un four Ă gaz placĂ© Ă ses cĂŽtĂ©s. Il change de tenailles, et dĂ©bute l'Ă©tirage du morceau d'acier. DĂ©portĂ© sur le cĂŽtĂ© droit de la tĂȘte du marteau, il Ă©tire la douille par une frappe lente sur la tranche, puis sur le plat du lopin, utilisant la partie plate de l'enclume. Il Ă©tire ensuite la lame Ă la bonne longueur, frappant tour Ă tour le plat puis la tranche sur la partie arrondie de l'enclume. 32En une seconde chaude, le platineur Ă©carte la planche. Il Ă©tale la matiĂšre pour obtenir la largeur et la courbure du croissant. Face au marteau, il forge alternativement la tranche puis le plat. Pivotant sur le cĂŽtĂ©, il achĂšve une face de l'outil. De nouveau face au marteau, il prĂ©sente l'outil sur l'autre face en amorçant du poignet un mouvement avant-arriĂšre, et droite-gauche pour former la courbure du croissant. L'Ă©bauche terminĂ©e, il la pose sur un gabarit en tĂŽle afin de vĂ©rifier l'exactitude des dimensions et de la forme. Le biseautage et le planage effacer les traces du marteau... 33En une troisiĂšme chaude, le platineur amorce le biseau de la lame, en amincissant le bord externe de la planche. Il efface ensuite les traces de marteau des opĂ©rations prĂ©cĂ©dentes ; c'est le planage. Le platineur est face Ă son marteau, sa position varie peu. L'Ă©cartage et le roulage de la douille 34La lame du croissant Ă©bauchĂ©e, le platineur procĂšde alors Ă l'Ă©cartage de la douille. Le rythme de frappe et les gestes sont rapides, une rĂ©glette lui permet de vĂ©rifier la largeur de la douille. Debout, face Ă un marteau de plus petite dimension, Ă l'aide d'une paire d'enclumes spĂ©cifique, le platineur relĂšve les bords de la douille, puis opĂ©rant un mouvement rotatif, il roule, puis ferme le fourreau dans lequel viendra se glisser le manche. 35Un seul homme assure l'ensemble des opĂ©rations de platinage. La suite des manipulations se fait selon un ordre prĂ©cis et Ă travers un ensemble de postes opĂ©ratoires diffĂ©rents. Le trempeur 36La trempe et le revenu assurent au mĂ©tal les qualitĂ©s nĂ©cessaires de duretĂ© » et de robustesse. Le trempeur chauffe Ă 1180 °C les piĂšces dans un four, puis les plonge pendant trois minutes dans un bain de trempe, qui peut ĂȘtre d'huile, ou d'eau additionnĂ©e de produits chimiques. Le trempeur rince ensuite les outils dans un bac d'eau tiĂšde, ou encore essuie dans de la sciure, ceux trempĂ©s Ă l'huile. Il efface ainsi toutes traces de matiĂšre grasse avant d'opĂ©rer le revenu », qui se dĂ©roule une nuit durant, sur une pĂ©riode de quinze heures. Le redresseur 37Le redressage se situe aprĂšs la trempe et le revenu. En effet, les opĂ©rations successives de chauffe et de refroidissement dĂ©forment le mĂ©tal. Au marteau Ă main, sur une petite enclume, le redresseur corrige les dĂ©formations de l'outil. Il arrondit la douille au marteau, redresse le talon du croissant, ou bien encore ajuste les dents du bĂȘchard, aligne la lame de la faucille avec la soie » du manche... Le redressage s'effectue Ă froid. Les progrĂšs importants rĂ©alisĂ©s dans la composition chimique des bains de trempe assurent une dĂ©formation minimale du mĂ©tal. Dans le cas d'une trempe Ă l'eau pure, le redresseur opĂšre Ă chaud le remodelage des outils. L'aiguiseur 38DerniĂšre Ă©tape avant le vernissage et l'emballage, l'aiguisage. Ce poste de travail est en passe d'ĂȘtre totalement automatisĂ©. En effet, la pĂ©nibilitĂ© occasionnĂ©e par la position semi courbĂ©e de l'aiguiseur, l'humiditĂ© constante de la piĂšce, les chocs provoquĂ©s par l'irrĂ©gularitĂ© de la meule, rendent ce mĂ©tier rude et difficile. Pourtant l'aiguisage manuel assure une qualitĂ© supplĂ©mentaire Ă l'outil que l'on peut juger au fil de la lame, ou Ă la hauteur du taillant. 39Pourtant l'aiguisage manuel assure une qualitĂ© supplĂ©mentaire Ă l'outil que l'on peut juger au fil de la lame, ou Ă la hauteur du taillant. 40L'aiguiseur est debout, contre une botte mobile sur laquelle se trouve le porte-outil. L'outil est fixĂ© sur le porte-outil, que l'aiguiseur dĂ©place de la main droite, tandis que la main gauche maintient la botte de protection. Il aiguise une face, puis l'autre en portant contre la meule, qui tourne Ă 7000 tours par minute, le tranchant de l'outil. 41L'outil aiguisĂ© est ensuite verni, emmanchĂ©, puis emballĂ©. Si chaque usine possĂ©dait autrefois un atelier de menuiserie, la confection des manches, portes-lames est aujourd'hui entiĂšrement sous-traitĂ©e. Par ailleurs, d'autres matĂ©riaux que le bois sont usitĂ©s. La bakĂ©lite par exemple, que l'on retrouve souvent dans les ustensiles de mĂ©nage, couperet de cuisine, hachoirs, etc. Outil et technologie culturelle 42A l'origine de l'outil se trouve le paysan, le maçon, le charpentier, le vigneron, pour qui le modĂšle et la forme de l'instrument se doivent d'ĂȘtre parfaitement adaptĂ©s aux conditions d'usage. De lĂ dĂ©coule la nĂ©cessitĂ© de concevoir un outil en relation avec son environnement d'utilisation. Une houe, une bĂȘche, un croc ne peuvent ĂȘtre rĂ©alisĂ©s sur un mĂȘme modĂšle, selon qu'ils sont destinĂ©s Ă une utilisation en terrain caillouteux ou marĂ©cageux, en montagne, en plaine, etc. Si l'on s'en tient au marchĂ© intĂ©rieur français, les taillandiers de la Fure disposent d'un rĂ©seau de clients rĂ©partis dans toutes les provinces. Les quincailliers sont rĂ©guliĂšrement dĂ©marchĂ©s par les reprĂ©sentants, qui enregistrent les commandes et notent les demandes particuliĂšres. Un agriculteur dĂ©sire-t-il une serpe proche du modĂšle local, mais plus fine ou plus allongĂ©e ? Il reviendra au quincaillier de dessiner hĂątivement la forme, et de la remettre Ă l'usine. Le contremaĂźtre, ou le patron, reprendra la proposition, concevra un modĂšle nature », puis rĂ©alisera un modĂšle gabarit » Ă partir duquel seront forgĂ©es les 30 ou 40 piĂšces Ă la commande. Cette nouvelle serpe recevra une dĂ©nomination particuliĂšre, puis sera archivĂ©e sous les rĂ©fĂ©rences du client demandeur. Les archives des usines constituent une source de renseignements inĂ©puisables sur les mille et une formes d'outils en usage. Les stocks de gabarits conservĂ©s sont, pour les taillandiers, une richesse infinie de formes, d'idĂ©es, d'objets. Les Forges et Taillanderies de Charavines disposent des 6000 modĂšles classĂ©s, numĂ©rotĂ©s, par rĂ©gion, client, et forme. Les taillandiers Rival Ă Fure en possĂ©daient 4000, alors que Revex Forges, Ă Renage, compte environ 10 000 articles avec une appellation propre. 43En exemple de l'exigente diversitĂ© des fabrications dans la premiĂšre moitiĂ© du xixe siĂšcle, le catalogue de P. Experton-Revollier ne propose pas moins de 178 modĂšles de serpes. 44Cette infinie variĂ©tĂ© ne trouve aucune explication rationnelle, pas mĂȘme dans les diffĂ©rences d'origines gĂ©ographiques. Un pays, un village peut dĂ©nombrer plusieurs formes du mĂȘme instrument le modĂšle de serpe Paris en compte 11, fort peu diffĂ©rentes les unes des autres, et toutes destinĂ©es Ă la mĂȘme utilisation. 45A l'inverse des produits manufacturĂ©s fabriquĂ©s en sĂ©rie uniforme, un outil est conçu selon le besoin exprimĂ© et dĂ©fini par l'utilisateur. Les catalogues de fabrication, constituĂ©s au fil du temps, dĂ©coulent d'une demande d'usage. Ils ne sont jamais le fait d'un quelconque bureau d'Ă©tudes leur principe s'inscrit dans les traditions techniques micro localisĂ©es. 46Monde de travail reposant sur une technologie simple, les taillanderies de la Fure relĂšvent d'une sĂ©rie d'arrangements sociaux, historiques, gĂ©ographiques, techniques et culturels. Une mentalitĂ© spĂ©cifique s'exprime Ă travers la vivacitĂ© des traditions professionnelles. 47Mais les taillandiers sont en butte Ă des difficultĂ©s Ă©conomiques, et Ă une sĂ©vĂšre concurrence internationale. A l'heure oĂč la mĂ©canisation s'est rĂ©pandue dans tous les grands domaines, le marchĂ© de l'outil Ă main est peu porteur. Aussi, pour survivre, ont-ils opĂ©rĂ© rĂ©cemment une concentration des moyens de production, et une rationalisation du travail. Selon les Ă©quipements en place, chaque usine prĂ©sente une orientation technique et Ă©conomique prĂ©cise. RĂ©alisation de petites sĂ©ries et d'outils dĂ©licats Ă forger pour les Forges et Taillanderies de Charavines, qui possĂšdent une chaĂźne de fabrication traditionnelle, et comptent des ouvriers trĂšs qualifiĂ©s. ExĂ©cution de commande importante aux ateliers de Renage, Ă©quipĂ©s de presses de plusieurs tonnes pour un forgeage par estampage, et matriçage. Les taillandiers de la Fure raisonnent aujourd'hui en termes de survie Ă©conomique, productivitĂ©, rendement, uniformisation de la production. Ce sont lĂ , ajoutĂ©s aux multiples valeurs qui fondent leur tradition technique, autant d'atouts nĂ©cessaires Ă la poursuite de leur activitĂ©. cQRQd3.